Le premier ministre indien a inauguré mardi 19 novembre la première
banque publique pour les femmes, visant à renforcer leur sécurité et
leur indépendance financière après une série de crimes sexuels qui ont
ému le pays.
Manmohan Singh a inauguré la Bharatiya Mahila Bank (la banque
indienne des femmes) dans le sud de Bombay, capitale financière du pays,
au sein de l'une des sept agences désormais ouvertes.
Annoncée en février, cette banque accordera des prêts en particulier
aux femmes, même si les hommes pourront aussi ouvrir un compte. Ce
projet avait été dévoilé alors que l'Inde était sous le choc du viol en réunion d'une étudiante à New Delhi, morte de ses blessures.
En Inde, seulement 26 % des femmes détiennent un compte bancaire. "Une triste réalité", selon le premier ministre :
"Les femmes font face à une discrimination et des
difficultés chez elles, à l'école, au travail et dans les lieux publics.
Leur émancipation sociale, politique et économique reste un objectif
lointain. La mise en place de la Bharatiya Mahila Bank est un petit
pas".
BANQUES COOPÉRATIVES GÉRÉES PAR DES FEMMES
La nouvelle banque publique, dont le siège est à New Delhi, disposera
de 25 agences d'ici à mars et est présidée par Usha Ananthasubramanian,
ancienne dirigeante de la Punjab National Bank. Elle vise l'ouverture
de 771 agences d'ici à sept ans.
Le ministre des finances a indiqué que 10 milliards de roupies, soit
120 millions d'euros, avaient été budgétés pour l'institution, dont le
conseil d'administration est composé de 8 femmes. La banque emploie 86
personnes dans le pays, dont plus de 55 % sont des femmes, a indiqué un
responsable du groupe, sous couvert d'anonymat.
Parallèlement à cette première banque publique, il existe déjà en
Inde des banques au statut coopératif, gérées par des femmes et visant
une clientèle féminine, telle que la "Mann Deshi Mahila Sahakari Bank"
dans l'Etat du Maharashtra, dans l'ouest du pays. Cette banque, fondée
en 1997, revendique plus de 185 000 clients.
Prostitution : "L’Etat n’a pas à légiférer sur l’activité sexuelle des individus"
Le Monde.fr |
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Propos recueillis par Gaëlle Dupont
Elisabeth Badinter, 69 ans, est philosophe. Elle a souvent pris des
positions à contre-courant sur les grands sujets de débats parmi les
féministes: opposée à la loi sur la parité en 2000, elle est favorable à
la grossesse pour autrui sous certaines conditions. Dans son dernier
ouvrage, Le Conflit: la femme et la mère (Flammarion, 2010), elle dénonçait le retour du naturalisme et de la culpabilisation des mères. Qu'avez-vous pensé de l'appel des "343 salauds", qui s'opposent à la pénalisation des clients de prostituées au nom du respect de la liberté?C'était
une intervention nécessaire, car je suis frappée du silence des hommes
dans ce débat. Deux catégories d'individus ne s'expriment pas: les
hommes, prochaines cibles de la loi, et les prostituées. La forme était
contestable. Mais je n'ai pas de critiques sur le fond. Pourquoi êtes-vous défavorable à la pénalisation des clients de prostituées?La
pénalisation, c'est la prohibition. Je préfère parler de prohibition
plutôt que d'abolitionnisme, car c'est l'objectif des auteurs de la
proposition de loi. Ils font référence à l'abolition de l'esclavage ! La
vente d'un individu n'est pas comparable à la prostitution, qui est une
mise à disposition de son corps à des fins sexuelles, que l'on peut
accepter ou refuser dès lors que l'on n'est pas prisonnière d'un réseau.
Leur argument est qu'il faut tarir la demande pour qu'il n'y ait plus
d'offre. Je n'arrive pas à trouver normal qu'on autorise les femmes à se
prostituer, mais qu'on interdise aux hommes de faire appel à elles. Ce
n'est pas cohérent et c'est injuste.
La deuxième raison de mon opposition est que l'on prétend qu'il n'y a
que la prostitution esclavagiste, dominée par les réseaux, où les
femmes n'ont pas moyen de dire non. Mais il y a aussi des indépendantes
et les occasionnelles, qui veulent un complément de ressources. Leur
interdire de faire ce qu'elles veulent avec leur corps serait revenir
sur un acquis du féminisme qui est la lutte pour la libre disposition de
son corps. Même si c'est une minorité de femmes. Ce n'est pas une
affaire de quantité mais de principe. Pourquoi, selon vous, les hommes sont-ils une "cible" de cette loi?Je
ressens cette volonté de punir les clients comme une déclaration de
haine à la sexualité masculine. Il y a une tentative d'aligner la
sexualité masculine sur la sexualité féminine, même si celle-ci est en
train de changer. Ces femmes qui veulent pénaliser le pénis décrivent la
sexualité masculine comme dominatrice et violente. Elles ont une vision
stéréotypée très négative et moralisante que je récuse. Peut-on parler de choix lorsqu'on est dans une stratégie de survie? Toutes
les femmes qui ont besoin d'argent ne se prostituent pas pour survivre!
Pour les victimes des réseaux, on ne peut plus parler de choix car il
est quasiment impossible de revenir en arrière. La lutte contre
l'esclavage des femmes doit donc être sans merci. Pour lutter contre les
réseaux, il faut une condition sine qua non: que les prostituées
puissent dénoncer leurs proxénètes à la justice sans craindre pour leur
vie. Elles doivent être assurées de leur sécurité, d'avoir des papiers,
et d'être aidée. La loi contient des dispositions en ce sens, mais qui
me paraissent vagues. Quel est le budget? Comment le prévoir quand on ne
connaît même pas le nombre de prostituées? Est-ce que la lutte contre
les réseaux sera une priorité pour la police? Je n'ai pas le sentiment
que cela soit le cas. Vous acceptez que des femmes se livrent à un travail très pénible, avec parfois des séquelles psychologiques lourdes? Je
n'ai jamais pensé que la dignité d'une femme reposait sur la sexualité.
Je suis favorable à la pédagogie sur la prostitution et les séquelles
qui peuvent en résulter. Mais toutes les femmes n'ont pas le même
rapport à leur corps. Dans certaines conditions, la prostitution est
difficile à vivre, mais il y a des femmes pour lesquelles ce n'est pas
aussi destructeur qu'on le dit. Je regrette qu'on n'entende pas
davantage les prostituées. Elles seules sont habilitées à parler. Mais
quand l'une affirme: "Je le fais librement", on dit qu'elle ment et qu'elle couvre son proxénète. Ce sont les seuls êtres humains qui n'ont pas le droit à la parole. Quelles seront les conséquences de la loi selon vous? Est-ce qu'elle va mettre fin à la prostitution?Bien
sûr que non. Je ne connais aucune prohibition qui fonctionne. Elle
démultiplie le pouvoir des mafieux. Les prostituées disent qu'elles ont
besoin de parler avec le client pour savoir qui il est. Elles apprennent
à détecter les pervers. Dans la négociation, la prostituée peut dire ce
qu'elle fait ou ne fait pas. Je suis inquiète pour celles qui vont
passer par Internet: elles n'auront plus la possibilité de faire cet
examen. Une loi qui veut venir au secours des plus faibles va en fait
multiplier les dangers. D'ailleurs, la Norvège veut revenir sur la
prohibition décidée en 2009. L'Etat ne doit-il pas dire ce qui est acceptable ou non, comme lorsqu'il interdit la vente d'organes ou fixe un salaire minimum?La
vente d'organes est une mutilation définitive, le salaire minimum
permet de lutter contre la misère. Ce n'est pas comparable. Sous
prétexte de lutter contre les réseaux, c'est la prostitution qu'on veut
anéantir. L'Etat n'a pas à légiférer sur l'activité sexuelle des
individus, à dire ce qui est bien ou mal. Où commence et où finit la
prostitution? Combien de femmes ou d'hommes sont en couple pour
l'argent? Personne ne songe à aller y voir. On ne parle jamais de la
prostitution masculine. Il y a aussi une misère sexuelle féminine et des
femmes qui font appel à des prostitués. Il n'est plus alors question de
domination masculine dénoncée par les auteurs de la loi. La prostitution est-elle nécessaire pour l'assouvissement de
certains besoins sexuels, faut-il en faire un métier comme un autre?Oui,
et c'est pour cela qu'on ne pourra pas l'éradiquer. Sur la
légalisation, il faut être prudent. On voit qu'en Allemagne, les choses
dérapent, les mafieux profitent de la reconnaissance de la prostitution.
Il faut donc en faire une activité sécurisée, donner aux prostituées
les droits qu'elles réclament, comme celui de s'associer ou de louer un
studio. Je voudrais tellement qu'on arrête de traiter les prostituées
comme des rebuts de l'humanité. Un certain discours bien-pensant ne peut
que les enfoncer davantage dans l'humiliation.
Au festival Berlin Voguing Out, en août 2012.
JÖRG CARSTENSEN/DPA/CORBIS
Costumes extravagants, maquillages
outranciers, énergie à revendre : les danseurs de voguing parodient les
poses des mannequins. Un phénomène à l'affiche du Centre Pompidou, à
Paris
- Antigone Sr/Twenty Looks or Paris Is Burning at the Judson Church, de Trajal Harrell. Samedi 28 septembre, à 20 h 30. De 14 € à 18 €. - The Fire Flies, Francesca, Baltimore, documentaire américain de Frédéric Nauczyciel (43 min). Suivi du solo Control-Unlimited Natural Tender, avec Dale Blackheart. Mercredi 2 octobre, à 20 h 30. De 10 € à 14 €. Centre Pompidou, Paris 4e. Tél. : 01-44-33-79-13.
www.centrepompidou.fr
Longues tresses,
visage transparent, sourire tendrement narquois, Lionel Dita Mamita est
beau jusqu'au bout de ses ongles nacrés violets et le sait. Il sait
aussi combien sa grâce ambiguë, très féminine, attire. Il s'en amuse
avec délicatesse. D'origine guadeloupéenne, Lionel est postier dans le
14e arrondissement de Paris. Le reste du temps, Dita Mamita, alias Diva
Ivy, " vogue ". Il appartient à la toute jeune communauté française de
voguing - une cinquantaine de personnes environ -, apparue en banlieue
parisienne depuis deux ans.
Ce phénomène, né dans les quartiers noirs de New York dans
les années 1960, encore souterrain en France, connaît un retour en force
depuis cinq ans. Dans les boîtes de nuit. Dans les bacs à compilations
musicales. Dans les théâtres. Le Centre Pompidou, à Paris, fait même son
affiche de la rentrée avec ce mouvement minoritaire et underground. "
Parce qu'il a influencé aussi bien la culture R'n'b, l'esthétique clip
que certains jeunes chorégraphes contemporains comme Trajal Harrell ou
François Chaignaud, explique Serge Laurent, programmateur des spectacles vivants au Centre Pompidou. Faire connaître l'histoire de cette culture me semble très important aujourd'hui Rosita Boisseau